La famille Criegee a signé une promesse de vente pour l’ex-usine Cosserat qui pourrait devenir un site culturel, artistique et commercial unique dans la région.
Les témoignages du glorieux passé industriel du textile qui a façonné nos paysages disparaissent doucement. Ces friches offrent pourtant un potentiel de reconversion qui panserait, un peu, les plaies des drames sociaux vécus en ces lieux.
Cosserat pourrait bien éviter ce destin. La partie appartenant à la Ville est en travaux (lire par ailleurs) et la famille Criegee aurait signé une promesse de vente, pour les 13 hectares qu’elle possède, avec Makeitso, une maîtrise d’œuvre composée de Jessica Label architecte- DPLG et de Columbia NY. Philippe Blandin, un des architectes, explique que son cabinet finalise l’acquisition pour « un cluster artistique et littéraire » mais il reste prudent. Pas question de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Si ce projet aboutit, Velvet Factory, qui assurerait la maîtrise d’ouvrage, veut requalifier, valoriser et réinventer Cosserat. Le quartier pourrait devenir un pôle artistique et culturel comme il n’en existe pas en Pïcardie. « L’ ensemble est exceptionnel avec ses bâtiments en briques rouges aux volumes impressionnants avec des modénatures typiques de l’époque », note Philippe Blandin. Sur plus de 22000 m² « d’espace hors normes aux allures de gigantesque loft industriel, la Velvet-Factory développera une plate-forme hybride artistique, culturelle et technologique contemporaine », poursuit-il. Y sont attendus ateliers d’artistes, habitations, locaux d’activités, showrooms, lieu de conservation d’art, restaurants, résidence étudiante, commerces, maison pour seniors, équipements publics (spectacles), activités en circuits courts, ferme urbaine, green-tech (environnement), coworking, cowork-crèche… Ce type d’endroits manque à Paris Il est vrai que l’endroit s’y prête. Le 19e est une époque où il fallait montrer sa puissance. Maison du gardien, réfectoire, coopérative, maison de direction, la seule entrée principale majestueuse pourrait accueillir un amphithéâtre de mille places. Et au milieu, s’écoule la Somme. « C’est proche du centre-ville et des transports en commun avec de grands espaces verts, des arbres et des cours d’eau et des maraîchers », présente l’architecte. Pour lui ce type d’espaces manque à Paris. Beaucoup d’artistes cherchent du volume dans des lieux atypiques. Le site Cosserat correspond à ce besoin. « C’est un archétype de l’architecture industrielle du 19e siècle. Les toits en terrasse offrent un panorama magnifique de la ville d’Amiens et de la campagne environnante. La plupart des façades et des toitures, ateliers, maisons, monument aux morts, etc. sont inscrits à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques », liste Philippe Blandin. Le passé prestigieux, une des premières manufactures de velours au monde, créée en 1794, aux 500 métiers à tisser qui firent rêver Jules Verne ajoute à son charme. La Ville surveille de près ce projet pour lequel elle a collaboré tout en attendant que l’aspect financier soir bouclé. Mais la nouvelle est accueillie avec satisfaction, alors que la ZAC Montières dans son ensemble fait l’objet d’un programme de réflexion et que des travaux ont été lancés sur la partie rachetée à Criegee sous le mandat de Gilles de Robien. L’ancienne municipalité avait bien tenté d’acheter le reste à la famille Criegee, qui a liquidé l’activité en 2008 tout en gardant la marque connue mondialement. Les Allemands demandaient 4 M€ contre les 1,7 estimés par les Domaines. La Ville se refusa ensuite à préempter, même au prix de l’estimation « pour ne pas financer le plan social », justifiera-t-elle.
La Ville aménage sa partie
« Développer une cité des métiers d’art, dont la Manufacture Royale Bonvallet, constituerait la première pierre. Ce petit atelier de cinq personnes exporte sur les cinq continents de luxueuses étoffes gaufrées suivant une technique d’impression inventée à Amiens au XVIIIe siècle ». Voilà le plan de la municipalité. Elle y envisage aussi un musée vivant du textile, « autour de l’association Bleu de Cocagne composée de machines issues de l’industrie textile, témoignant d’innovations locales majeures ». La Ville a sollicité un architecte paysagiste pour une étude patrimoniale architecturale et paysagère en vue d’établir un plan guide et un plan de gestion. « L’objectif est de voir la manufacture reconvertie et inscrite parmi les points d’intensité de la ville », explique Jean-Christophe Loric, adjoint à l’urbanisme. Les locaux de Bleu de Cocagne vont être réhabilités et la Manufacture Royale Bonvallet de Germain Benoît étendue.
SOURCE : http://www.courrier-picard.fr/12265/article/2017-02-21/le-site-cosserat-amiens-va-t-il-connaitre-une-nouvelle-vie